En réalisant à la fin des années 80 une série de dix films associés aux “dix commandements” bibliques, Kieslowski invente une nouvelle manière de traiter des questions morales au cinéma. Situant ses intrigues à Varsovie, à l'époque contemporaine, il opte pour une esthétique réaliste et un récit au présent, sans voix off ni flashback.
Le huitième épisode, consacré à l’interdiction de mentir, met en scène le témoignage d’une femme qui, en 1943, petite fille issue d’une famille juive, s’était vu refuser un faux certificat de baptême par une femme catholique, au nom justement de cet interdit religieux de "porter un faux témoignage".
À un moment historique où les paroles liées à la Shoah se libèrent progressivement, Kieslowski aborde la question du refoulement à la fois individuel et collectif de la guerre dans la société polonaise, et donne pour la première fois la voix dans un film polonais à une “enfant cachée”.
J’explore ici les moyens cinématographiques mis en œuvre par le cinéaste pour faire exister, au sein d'une narration au présent, ce passé refoulé. Tout en empruntant aux genres fantastiques et policiers, Kieslowski donne une place centrale à la parole des témoins et met en scène le potentiel libérateur de leur témoignage.