Dans un train qui traverse un pays imaginaire d'Europe de l'est au bord de la guerre, Iris, une jeune anglaise, s'inquiète de la disparition de sa voisine et compatriote, Miss Froy. D'abord indignée par la mauvaise foi des autres passagers qui nient l'avoir vue, l'héroïne, en proie à des doutes, va tout mettre en œuvre pour faire reconnaître l'existence de Miss Froy et la sauver du complot dont elle est la cible.
Cette situation kafkaïenne est un moyen pour Hitchcock d'aborder deux enjeux cruciaux de la société anglaise de l'époque. À la question intime du mariage - l'héroïne a des doutes sur son fiancé - se mêle celle, collective, de la montée des tensions en Europe et de l'indifférence dont fait preuve la population anglaise.
Car si Une femme disparaît est un film de genre divertissant au croisement du film d'espionage et de la comédie romantique (comme quasiment toute la filmographie d'Hitchcock), c'est aussi une œuvre engagée qui s'inscrit dans un contexte d'avant-guerre. Le doute radical, ou "scepticisme" (au sens de Stanley Cavell) qu'affronte l'héroïne n'est pas sans lien avec "l'esprit munichois" qui paralyse l'Europe de l'ouest face à la montée du nazisme. Il n'est pas anodin de constater que la sortie du film en Angleterre et aux Etats-Unis, en automne 1938, coïncide avec les accords de Munich et l'annexion des Sudètes par Hitler.